4 avril 2021 : Pâques – A propos de pâquerettes

Aux temps héroïques de l’aviation balbutiante, les pilotes qui osaient se mettre aux commandes de ces machines volantes lourdes, longues au décollage et plus habilitées à faire du rase-mottes qu’à s’élever dans les airs, recevaient le surnom de « faucheurs de marguerites » (cf. le feuilleton télévisé des années 1970, réalisé par Marcel Camus).

Parce qu’elles fleurissent à la période de Pâques, ces modestes petites marguerites des prairies s’appellent pâquerettes (1553 — d’abord sous les formes pasquerettes et pasquettes). Par allusion à un vol ne s’élevant guère du sol, au ras des pâquerettes est devenu un synonyme amusant de « à ras de terre » pour désigner, au figuré, toute pensée, toute idée mesquine, qui ne vole pas bien haut ou encore prosaïque, trop terre à terre : « La littérature rendue au sol, à sa factualité, à son exercice ; l’écriture comme geste très réel, accompli par des êtres de chair. C’est ce dont il faut convaincre les lecteurs en herbe souvent tentés de rester au ras des pâquerettes, rebutés par la distance qu’on semble devoir parcourir pour accéder au ciel des lettres. » (François Bégaudeau, Antimanuel de littérature, éd. Bréal, 2008.)

Précisons que, selon Esnault (1965), cueillir les pâquerettes a signifié « causer d’amour » :

« Dans les prés verts, au mois de mai,

 Écoutez-moi, bergeronnettes !

Dans les prés verts, au mois de mai,

J’allais cueillir les pâquerettes

Avec l’amour, avec l’aimé.

Les effeuillant, au mois de mai. »

 

Au milieu du XXème siècle, cueillir les pâquerettes est passé dans l’argot des cyclistes pour dire « musarder ».